RENAULT LVMH UNE REFLEXION SUR L’HISTOIRE ET LE POUVOIR
L’histoire de Louis Renault, fondateur de l’empire automobile de la marque du même nom, est marquée par une ascension fulgurante, une vision industrielle de génie… et une fin tragique entachée de soupçons de collaboration avec l’occupant pendant la Seconde Guerre mondiale. Accusé d’avoir mis ses usines au service de la machine de guerre allemande, Renault meurt en détention en 1944 dans des circonstances troubles. L’État français nationalise son entreprise peu après, sans indemnisation pour ses héritiers.
À l’époque, la frontière entre survie industrielle et compromission morale était floue. Pour beaucoup d’industriels, collaborer était présenté comme un mal nécessaire. Mais l’histoire a tranché d’un jugement sévère, et l’image de Renault en a été durablement écornée.
Aujourd’hui, un parallèle troublant peut être esquissé avec des géants du luxe comme celui du Seigneur, qui entretiennent des relations économiques avec des figures politiques clivantes telles que Donald Trump. Qu’il s’agisse de l’ouverture d’un atelier au Texas ou d’autres signaux de proximité, ces collaborations soulèvent des interrogations sur la morale de l’entreprise face au pouvoir, et contre ses dires sur les bureaucrates de Bruxelles.
Sommes-nous face à une nouvelle forme de collaboration, plus douce, mais toute aussi problématique sur le plan éthique ? Bien sûr, le contexte n’est plus celui de l’Occupation, ni celui d’un régime totalitaire. Toutefois, la logique sous-jacente, celle du compromis avec le pouvoir pour des intérêts économiques, reste comparable. On pourrait parler ici de soft collaboration, d’une collaboration d’images, destinée à protéger des parts de marché, à séduire certains électorats ou à garantir un accès favorable à des politiques publiques.
Les conséquences pour les groupes sont : « backlash » ou retour de bâton médiatique, boycott des consommateurs, perte de réputation… Dans une ère où les marques doivent montrer patte blanche sur leurs valeurs, la mémoire historique joue un rôle central. Et malgré la puissance du Seigneur, il pourrait un jour être jugé non pas par les tribunaux, mais par l’opinion publique et par l’Histoire, comme Louis Renault le fut en son temps.
L’histoire de Renault montre que les choix faits en période de troubles laissent des traces profondes. Les entreprises qui s’associent à des figures controversées sous prétexte d’opportunité risquent de voir leur image et leur héritage entachés. Le capitalisme n’est jamais apolitique. Et s’il n’est pas responsable devant la loi, il l’est toujours devant la mémoire collective. Le seigneur, qui sera accusé d’avoir jeté la première pierre, restera certainement de marbre. Avant de nier tout en bloc.
FM