AU BONHEUR DES DRAMES
C’est le dimanche que la solitude pèse le plus, mais le dimanche on peut traîner dans les magasins. La crise post-Covid, on la sent partout où on passe, les cartes bleues chauffées à blanc viennent révéler tous nos indices de frustration. Voilà quarante ans que nous nous suicidons lentement, voilà vingt-cinq ans que le savoir est relégué aux bibliothèques des accessoires, vingt-cinq ans aussi que les barbares frappent à la porte de toutes les manières, pour nous signifier que nous sommes morts et cette violence est la croûte des événements qui nous entourent.
Le nouveau fleuron du Seigneur, encore vide de clientes, et où le personnel, à peine arrivé, bourdonnait à l’intérieur comme une ruche qui s’éveille. Pourtant la joie de vivre ne s’achète ni au supermarché ni même dans les magasins de luxe. Dans les usines du Seigneur des Arnault ont fabriquent des produits de luxe et dans ses magasins, ils vendent de la satisfaction pour les riches et du désespoir pour les pauvres regardant ce flacon de parfum « Lalique » à 50 000 euros.
Et le déshabillé de la jeune mariée se commandera cette saison à la Compagnie des bons samaritains des oies blanches, plus noires qu’un tableau de Soulage. Nouveau grand magasin qui vient de s’ouvrir dans le quartier du centre, et « quand on y songe, les grands magasins sont un peu comme des musées, » disait déjà Andy Warhol.
Ce que j’aime dans ma folie, c’est qu’elle m’a protégé, depuis les premiers jours, contre la séduction des « élites » : jamais je ne me suis cru l’heureux propriétaire d’un ‘talent’ : et donc du coup pas d’ambition pour m’élever au-dessus des autres, seulement de contempler et regarder cette comédie humaine. Et si je range l’impossible au magasin des accessoires, que reste-t-il ? Seulement un homme, fait de tous les hommes et qui les vaut tous et que vaut n’importe qui.
Anonymode